STRUCTURES DE FUSIONS-ACQUISITIONS (F&A) POUR LES SOCIÉTÉS PRIVÉES CANADIENNES : ACQUISITION D’ACTIONS VS. ACQUISITION D’ACTIFS
12 avril 2024
Si vous envisagez d’acheter ou de vendre une société privée au Canada, il est fortement recommandé de demander des conseils spécialisés à des professionnels expérimentés dans les transactions de fusions et acquisitions (F&A).
Il existe deux formes courantes utilisées pour structurer les fusions et acquisitions de sociétés privées au Canada : les opérations d’achat d’actions et les opérations d’achat d’actifs. Dans une opération d’achat d’actions, l’acheteur achète la totalité (ou la majorité) des actions émises et en circulation de la société cible auprès de ses actionnaires. Une vente d’actifs implique l’achat négocié des actifs (ou de certains actifs) d’une société sans acquérir l’entité qui les possède. Une opération d’achat d’actifs est privilégiée lorsqu’une seule propriété ou division présente un intérêt, ou que le nouveau propriétaire souhaite plafonner l’exposition au passif hérité. Une troisième forme, moins couramment utilisée, est la combinaison de deux sociétés par le biais d’une fusion légale.
Le choix de la forme est une question préliminaire qui est déterminée lors des négociations entre un acheteur et un vendeur, qui impliquent généralement une contribution importante des conseillers fiscaux des parties.
Pour des raisons fiscales, les acheteurs préfèrent généralement les opérations visant des actifs – à moins que l’acheteur ne souhaite spécifiquement acquérir certains attributs fiscaux de la cible – tandis que les vendeurs préfèrent généralement les opérations visant des actions. Les parties à la transaction doivent considérer que les acquisitions d’actifs sont généralement plus complexes que les acquisitions d’actions, car elles exigent que les parties obtiennent un plus grand nombre de consentements et transfèrent un plus grand nombre d’actifs divers. Lors d’une opération visant des actions, une documentation n’est requise que pour le transfert des actions et occasionnellement pour la cession des prêts d’actionnaire.
Toutefois, les opérations d’achat d’actifs peuvent constituer la seule structure pratique lorsque les parties souhaitent transférer une partie (mais pas la totalité) des actifs d’une société. Par exemple, un acheteur peut être uniquement intéressé par l’inventaire et l’équipement que possède la société et peut proposer d’acheter uniquement ces actifs souhaités. De plus, la diligence raisonnable supplémentaire requise dans le contexte d’une opération visant des actions peut imposer des délais préalables à l’acquisition plus longs.
Un acheteur peut également souhaiter une opération d’achat d’actifs car elle implique moins de risques en matière de responsabilité. Les acheteurs sont tenus par la loi d’assumer la responsabilité de la contamination de l’environnement et des employés syndiqués, quel que soit le type de transaction. Cependant, lors d’une acquisition d’actifs, l’acheteur n’est pas tenu d’assumer la responsabilité des employés non syndiqués à moins qu’il ne choisisse de leur offrir de nouveaux contrats. Les vendeurs peuvent parfois exiger de l’acheteur qu’il propose des contrats similaires ou identiques aux employés existants afin d’éviter les réclamations pour licenciement abusif. De plus, l’acheteur peut utiliser les actifs achetés pour créer une nouvelle société, réduisant ainsi le risque de responsabilités imprévues pouvant survenir avec la société actuelle. Malgré la responsabilité réduite, les acheteurs doivent prendre les précautions de diligence raisonnable appropriées en effectuant des recherches et des enquêtes, telles que des recherches de titres, de taxes, de zonage et d’incendie, avant de conclure une transaction.
Si la méthode choisie est une opération visant des actions, l’acheteur peut prendre certaines mesures pour se protéger de toute responsabilité. De plus, un acheteur devrait envisager de demander un accord d’indemnisation ou une retenue du prix d’achat pendant une période donnée afin de s’assurer que sa responsabilité ne sera pas engagée pour des imprévus survenant au cours d’une période de temps spécifiée.
ENJEUX FISCAUX
Vente d’actions
Généralement, cette méthode est privilégiée par le vendeur en raison des avantages fiscaux sur le revenu des particuliers. Le produit de la vente d’actions (au-dessus du prix de base rajusté du vendeur) est imposé comme un gain en capital et seulement 50 % du produit est inclus comme revenu. Il s’agit d’un avantage financier important pour le vendeur. De plus, si certaines conditions sont remplies, une exonération cumulative des gains en capital de 1 016 836 $ (indexée à l’inflation) est offerte en 2024 aux résidents canadiens qui vendent des actions d’une petite entreprise admissible. En conséquence, le vendeur peut être disposé à négocier un prix inférieur en échange de l’acceptation par l’acheteur d’une opération visant des actions.
Une société vendeuse peut également être en mesure de réduire ses gains imposables en obligeant la société cible à verser un dividende intercorporatif non imposable provenant du « revenu protégé » (la partie des bénéfices non répartis attribuable aux bénéfices déclarés aux fins de l’impôt sur le revenu) avant la vente. Le prix d’achat sera réduit en conséquence.
Il peut également y avoir des avantages fiscaux pour l’acheteur. Dans certains cas, un acheteur peut préférer une opération visant des actions pour profiter du report des pertes fiscales autres que des pertes en capital de la société cible (c.-à-d. les pertes d’entreprise) qui peuvent être appliquées contre les revenus futurs. Un achat d’actions permet également à un acheteur d’éviter de payer les taxes de vente et de mutation immobilière sur les actifs achetés.
Vente d’actifs
Une société cible voudra généralement que le prix d’achat soit attribué de manière à minimiser la récupération de la déduction pour amortissement précédemment déduite sur les biens amortissables. Un acheteur, en revanche, souhaitera généralement affecter la plus grande partie possible du prix d’achat à un bien amortissable afin de pouvoir « augmenter » la valeur des actifs jusqu’à leur juste valeur, ce qui se traduira par des déductions fiscales plus élevées pour les dépenses d’amortissement dans l’avenir.
Un acheteur sera tenu de payer les droits de mutation immobilière sur les immeubles et les bâtiments (y compris l’équipement fixé de façon permanente) et, sous réserve des exemptions de TPS et de TVH pour la vente de la quasi-totalité des actifs d’une entreprise, les taxes de vente sur l’équipement et les stocks (sous réserve de toute exemption disponible).
Acheteurs étrangers
En règle générale, un acheteur non canadien établirait une filiale canadienne pour agir comme véhicule d’acquisition. En plus d’atteindre les objectifs commerciaux, une filiale canadienne peut offrir plusieurs avantages à l’acheteur d'un point de vue fiscal canadien. Ces avantages peuvent inclure :
- Faciliter la déduction des intérêts sur le financement de l’acquisition contre les revenus de la cible canadienne.
- Création d’un capital versé élevé dans les actions de la filiale canadienne pour faciliter le rapatriement des fonds vers la société mère non canadienne sans retenue d’impôt canadienne.
- Positionner l’acheteur pour une éventuelle hausse (« bump ») du coût fiscal des immobilisations non amortissables de la cible canadienne.
Pour bénéficier de certains de ces avantages, il pourrait être nécessaire de procéder à une fusion ultérieure du véhicule d’acquisition et de la cible canadienne. Il faut faire preuve de prudence lors de la conception de la structure actionnariale de la filiale canadienne et s’assurer qu’elle soit correctement capitalisée et financée pour l’acquisition.
Lorsqu’il s’agit d’acquérir des actifs plutôt que des actions, il est encore plus important d’envisager le recours à une filiale canadienne. Si un acheteur non canadien achète directement des actifs commerciaux canadiens, il sera responsable des dettes et des obligations découlant des opérations. Il sera également redevable de l’impôt sur les revenus de ces actifs et de toute entreprise exercée au Canada et devra produire chaque année des déclarations de revenus canadiennes pour déclarer ses revenus provenant de ses opérations canadiennes.
En faisant appel à une filiale canadienne pour acquérir les actifs et mener les opérations canadiennes, la filiale devient responsable de la déclaration du revenu et du paiement de l’impôt sur le revenu, à la place de la société mère non canadienne.
CONCLUSION
Pour de nombreuses personnes, vendre ou acheter une entreprise est l’une des décisions les plus importantes de leur vie. Déterminer la structure appropriée est essentiel à la réussite d’une transaction. Il est crucial d’obtenir les conseils appropriés de conseillers qualifiés avant de s’engager dans une structure, même sur une base généralement non engageante au titre d’une lettre d’intention (« LOI »).
Que vous cherchiez à acheter ou à vendre une entreprise, il y a de nombreux éléments à prendre en compte lors du choix entre une opération visant des actifs ou une opération visant des actions. En tant qu’acheteur, il est essentiel de prendre en compte les implications potentielles en matière de responsabilité et de fiscalité et de prendre des mesures pour protéger votre investissement, par exemple en effectuant les recherches de diligence raisonnable appropriées. En tant que vendeur, il est utile de considérer les implications fiscales et la responsabilité potentielle en matière de droit du travail. Même si les acheteurs privilégient généralement une acquisition d’actifs et les vendeurs une vente d’actions, des circonstances uniques et les résultats souhaités peuvent entraîner un changement de préférences. Il est avantageux de consulter un avocat d’affaires et d’explorer toutes vos options avant de signer des documents.
N’hésitez pas à nous contacter pour plus d’informations sur les opérations d’achat d’actifs et d’actions, ou si vous avez besoin d’aide pour une transaction commerciale.